New Victoria (néo-steampunk et zombies)

Publié le par Mocking Crow

Superbe ouvrage de Bragelonne, pour une très bonne histoire

Superbe ouvrage de Bragelonne, pour une très bonne histoire

Quand le steampunk rencontre le post-apocalyptique

2195, l'humanité a fini par s'auto-détruire et le monde que nous avons toujours connu a bien changé. Suite à des cataclysmes en tout genre et à l'arme atomique, plusieurs continents ont été  littéralement vaporisés, obligeant les derniers survivants à se replier le long de l'équateur. Au bout de plusieurs années de survie et d'errance, les derniers représentants de la race humaine commencèrent à construire un nouvel empire: les Territoires du Sud. Afin de créer le monde le plus parfait possible, ils prirent comme modèle l'époque victorienne du XIXème siècle, symbole de révolution technologique, d'ordre et de prospérité. Bien sûr ce mode de vie ne fit pas que des heureux, si les premières années se passèrent dans le calme, un mouvement d'opposition vit le jour: les Punks. Après de nombreux conflits, ceux-ci furent repoussés dans le Sud du pays où ils établirent leur territoire. Le monde est depuis divisé en deux: au Sud les punks et leur culture débrouillarde (du pure steampunk en somme) et au Nord, la société New Victoria avec ses haut-de-forme, robes en mousseline, chaperons, son sexisme ultra-poussé et sa technologie de pointe (tablettes, smartphones, écrans omniprésents, hologrammes et avancées scientifiques toujours plus impressionnantes).
C'est dans ce nouveau monde que la New Victorienne, Nora Dearly, est kidnappée par une faction rebelle en plein milieu de la capitale. Sa captivité l'amène à rencontrer des personnages haut en couleur, parmi lesquels Bram Griswold, un jeune soldat revenu d'entre les morts...
 
New Victoria est une de ses sagas dont on s'interroge sur la raison de son échec. L'univers est superbe, les personnages variés et attachants, la plume de Lia Habel efficace et la traduction de très bonne qualité. Alors pourquoi si peu de succès ? Est-ce parce que ce sont les premiers livres de l'auteur ou parce qu'ils sont sortis au mauvais moment ? Mystère et c'est bien dommage, d'autant plus qu'un troisième tome était prévu, mais aucun éditeur n'étant véritablement interessé par la saga, celle-ci s'arrête donc au deuxième tome... pour l'instant, si l'on croit le site officiel de l'auteur. Ceci étant l'édition intégral possède une vraie fin, laissant certes entrevoir les possibilités d'une suite, mais une vraie fin tout de même. 
 
Quand le steampunk se croise avec le post-apocalyptique et les zombies, le résultat est loin d'être dégueu, il est même excellent. Comme dans Leviathan, les deux protagonistes que tout oppose (l'un est punk, l'autre néo-victorienne) tombe amoureux l'un de l'autre et si le premier tome est centré sur la découverte des personnages et de l'univers, le second, plus posé, est beaucoup plus sombre, laissant plus de place à la psychologie des personnages. C'est d'ailleurs un peu là que le bât blesse, l'héroïne rebelle et plein de verve du premier tome se fragilise bien trop et ressemble plus à la Bella de Twilight, l'anémie en moins. Une baisse de rythme pourtant nécessaire pour opposer la liberté des punks et du reste du monde, au cadre plein de conventions de la société néo-victorienne. Toutefois, les scènes d'actions, plus rares que dans le premier bouquin, sont toujours aussi dynamiques et efficaces; qu'il est bon de voir ce monde si bien ordonné voler en éclat et basculer dans la folie.

Du steampunk à la sauce Bit-Lit ?

​C'est du moins ce que les auteurs du Guide du Steampunk semble pointer du doigt dans New Victoria. Si la Bit-Lit est rattaché au vampire habituellement, certains livres du genre se permettent quelques écarts. Mais quoi qu'en disent ces messieurs, New Victoria n'est pas de la Bit-Lit, en tout cas le récit n'est pas suffisament centré sur l'amour entre les deux protagonistes pour l'être véritablement, surtout le premier tome (même si la couverture originale, tout de rose vêtue, prédisait le contraire). Certes la romance nécrophile entre Nora et Bram (ce dernier est un cadavre ambulant rappelons-le) pourra en agacer certains, mais le récit concerve une trame suffisament développée et alterne le point de vue des différents personnages remaquablement bien pour être apprécié à sa juste valeur. S'adressant surtout aux adolescents, cette romance aurait pu s'enliser dans le mielleux et le gnan-gnan, mais ce n'est pas le cas. Ni précipitée, ni caricaturale (difficile avec un zombie) l'évolution des sentiments des deux héros est parfaitement dépeinte par Lia Habel. Les autres personnages ne sont pas en reste, l'auteur alternant les points de vue des différents protagonistes, difficile de ne pas s'attacher à l'entourage des deux héros.
Une couverture Bit-Lit par excellence

Une couverture Bit-Lit par excellence

Un très beau livre, pour un steampunk de la plus belle eau

L'édition intégrale de Bragelonne frappe fort, les pages légèrement jaunies ornées d'engrenages, la tranche dorée et les nombreux reliefs scintillants ont de quoi séduire les plus matérialistes d'entre nous. Pour ma part je l'ai lu sous forme d'ebook, donc me fiche comme d'une guigne de l'apparence du bouquin, même si j'ai bien envie de me procurer cette sympathique édition... D'autant plus que le contenu en vaut largement la peine.

Contrairement à ce que beaucoup pensent, le mélange steampunk/zombie n'est pas foncièrement nouveau. Dans les livres se positionnant au XIXème siècle, les "zombies" sont le plus souvent des victimes d'une maladie rapportée d'Afrique (Les revenants de Whitechapel), d'une mutation darwiniste ou d'un déséquilibre de la psyché (L'étrange cas de l'homme mécanique). La particularité ici est que certains puissent se contrôler, alors que d'autres deviennent de véritables monstres assoiffés de sang. En revanche la romance entre un zombie et une humaine est très rare, à ma connaissance seul le film Warm Bodies possède le même genre de relation amoureuse.

Bien, c'est sur cet aspect si particulier que je vous laisse, en espérant vous avoir convaincu d'y jeter un coup d'oeil. Plus réussi sur tout les points que la trilogie Leviathan, New Victoria saura séduire non seulement le public adolescent mais aussi les lecteurs à la recherche d'originalité.
 

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