La la land (It's another day of sun ! Laaa la la laaa !)

Publié le par Corbeau Moqueur

La la land (It's another day of sun ! Laaa la la laaa !)

Bienvenue dans le monde coloré et sémillant de La la land, où chaque instant est l'occasion de s'envoyer en l'air en chanson ou en dansant, comme en témoigne la pétulante scène d'intro où en plein embouteillage une fille jonquille se met à chanter et finit par faire danser toute la bretelle sans crier gare. Puis voilà qu'on se retrouve à suivre tour à tour Mia, une actrice en devenir et Seb un jazzman old school. Tout deux galèrent comme pas permis et vont évidemment se retrouver à travers l'amour et la créativité, pour se faire ensuite malmener par toutes les saloperies de la vie réelle...

Passer la scène d'intro typique des comédies musicales (les vraies), le spectateur non-averti (et il faudrait le faire) ou abhorrant ce genre de métrage, peut encore quitter la salle et foncer dans une autre, car après tout il ne s'est passé que 5 minutes (de film, pour 20 minutes de pub). Pour le reste, malgré un scénario digne d'une série B romantique des années 80, la mise en scène, la réalisation et la bande-son de ce film dépassent la simple réussite. Je dirai même que cela transcende le cinéma hollywoodien passé et actuel (ouais, carrément), parce que j'ai tout simplement adoré ce film et je dis pas ça sous la pression de sa campagne publicitaire agressive (très similaire à celle de 50 nuances plus sombres), ni celle des critiques putassières (si vous me suivez depuis août dernier vous devriez comprendre pourquoi). Non, j'ai vraiment adoré ce film, dont je ne misais pas grand chose dessus, mais dont la première B.A. avait néanmoins titillé ma curiosité.

Aller voir ce film en VF est une connerie doublée d'une absurdité, dans la mesure où tout les passages chantés restent en anglais ; alors pour une fois prenez sur vous, merde !

La la land est signé Damien Chazelle, qui avait déjà émoustillé la populace et la presse 3 ans plus tôt avec Whiplash... et c'était là aussi mérité. Dans le cas présent, nulle doute que le jeune réalisateur voit une belle carrière se profiler, il en va de même pour son vieux pote Justin Hurwitz (le compositeur), tant le film semble rafler tout les oscars. Mais bon tout ça, on s'en fout (The Artist avait raflé pas mal de trucs aussi et pourtant c'est mauvais), l'important ici c'est que La la land est à la fois un hommage à de multiples comédies musicales (des vraies, dont notre industrie musicale devrait prendre de la graine) et au cinéma en lui-même avec une caméra virevoltante, des acteurs inspirés et en même temps et une photographie magnifique.

Puisqu'on parle de la photographie, la colorimétrie est aussi très maîtrisée, il y a notamment tout un travail minutieux sur le mauve (ce qui a valu au film d'être étiqueté "film pour filles" dans mon cinéma). Outre l'évidente teinte de l'affiche, la couleur de l'aube et certains éclairages, le violet est en quelque sorte le leitmotiv qui traverse le film et le temps. On le retrouve dans les tenues vestimentaires, quelques éléments du décor et des éclairages dichotomiques (rouge + bleu = violet), au point d'entrer en résonance avec l'OST (certains thèmes à l'instar de City of Stars et du Planetarium se retrouvent assimilés avec la-dite couleur). Une manière de lier musique, théâtre et photographie, ou plus simplement visuel.

Il est partout ! Le violet est partout ! C'est un complot.
Il est partout ! Le violet est partout ! C'est un complot.
Il est partout ! Le violet est partout ! C'est un complot.

Il est partout ! Le violet est partout ! C'est un complot.

Il y a beaucoup de choses à dire dans ce film et pour éviter les critiques à la Durendal, je vais tâcher d'éviter de m'étendre inutilement, mais je ne peux toutefois pas ne pas parler de l'OST. Déjà, en dépis de ses couleurs pétantes et de sa joie communicative, La la land n'est finalement pas un film si joyeux que ça, puisqu'il traite de la solitude de l'artiste, de la cruauté du monde réel et des désillusions, ce qui évite de tomber dans la niaiserie auquel le scénario laisse irrésistiblement penser. Le montage final se positionne d'ailleurs dans la continuité de Whiplash avec en prime une remarquable mise en scène, ainsi qu'une fin juste et authentique.

Toutes ces contrastes se manifestent, voire s'illustrent dans l'OST. Le film est en plus un véritable témoignage de respect au monde du jazz, qui est ici représenté à travers différents aspects et dérives (conséquence du modèle économique actuel) avec le free-jazz, le hard-bop,  le cool jazz, le brass band et j'en passe surement. Le thème principal (qu'on entend dans toutes les B.A., soit Another Day of Sun) est décliné de bien des manières et constitue - avec la colorimétrie violacée - l'une des lignes conductrices de ce film. Par ailleurs, les chansons sont toutes interprétées et chorégraphiées quasiment à la perfection (la première force d'ailleurs le respect), il paraît au passage que Ryan Gosling jouait vraiment les lignes de piano (contrairement à certains). Sa partenaire Emma Stone n'est pas non plus en reste et si ses prestations peuvent aller de la friteuse mal alimentée à l'étoile montante, elle s'est ici surpassée ne serait-ce qu'en faisant du théâtre dans du théâtre et en endossant une palanquée de rôles différents. Au demeurant, sa voix rêche laisse une impression étrange à chacune de ses amorces mélodiques et ce, malgré le timbre typique de Broadway (que j'affectionne beaucoup).

Pour tout dire j'ai écouté l'intégralité de la B.O. avant de voir le film, ce qui ne m'arrive que rarement (voire jamais). Pourtant malgré l'importance qu'occupe la bande-son dans le film (et ça ne se limite pas qu'aux chansons ou aux passages musicaux à part entière), La la land m'a pas mal rappelé Birdman et Avé Cesarpour pas mal de raisons subjectives et les thématiques abordées (ainsi que la juste utilisation des plans séquences lors des passages dansés).
Je pourrai encore noircir une bonne partie de la page pour parler de ce film, qui est nulle doute une franche réussite de l'année 2017, en plus d'être un vrai bijoux de réalisation, qui saura combler n'importe quel cinéphile (averti ou non). Bref, typiquement le genre rempli d'hommages et d'humilité, dont on ressort de fort bonne humeur, c'est le film à voir pour bien commencer l'année.

Publié dans Films, le coffre à bobines

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