Sully (Théorie VS Pratique)

Publié le par Corbeau Moqueur

Sully (Théorie VS Pratique)

Le 15 janvier 2009, la ville de New York et plus globalement le peuple américain si progressiste et exemplaire comme chacun sait à présent, fut frappé par un événement marquant.  Le commandant "Sully" Sullenberger et son copilote Jeff Skiles réussissent à poser son avion (un A320) sur l'Hudson et évitent ainsi une mort certaine à 155 personnes. Tout le monde est évidemment sur le cul et en moins de deux le commandant devient un héros national. Oui mais voilà, cet événement fait mauvaise presse auprès de la compagnie qui ouvre pratiquement immédiatement une enquête, pilotée par une flopée d'experts pas foutu de se repérer dans un cockpit, pour détruire la réputation du des pilotes et leurs carrières...

Donc ce qui intéresse Clint Eastwood ici n'est pas tant l'exploit aéronautique (d'une durée de 208 secondes) que son battage médiatique qui en a découlé. C'est un choix judicieux puisque d'une part cela prend à rebours les canons du film catastrophe, ensuite et surtout ça donne du volume à un film qui en temps normal n'a pas grand chose à raconter. Parce que pour résumer la situation on a amerrissage d'urgence d'un peu plus de 3 minutes et les points de vue d'à peu près tout le monde pour nous le raconter allant du pilote à la simple mouette qui voletait dans le coin. 

Très franchement cet événement ne m'a absolument pas marqué (la chose a dû sans doute occupé la case des faits divers dans nos journaux) et au terme du visionnage il y a un truc que je n'ai pas vraiment compris : Pourquoi la compagnie qui a un héros qui a sauvé 155 vies (en incluant la sienne) dans ce qui figure à présent parmi les trois amerrissage d'avions de ligne réussis, s'acharne à vouloir le faire tomber de son piédestal et ruiner sa vie comme ça ? Il me semblait pourtant que les ricains étaient les rois de la dissimulation et de la suppression... Cela Eastwood n'y répond pas assez, mieux vaut donc interprété. Enfin, si un pilote réussissait un truc pareil en France, on lui filerait la légion, le statut de héros national et une pension confortable. Mais c'est pas pour aujourd'hui la seule chose d'à peu près similaire qu'on ait eu dans le coin c'est le Costa Concordia et le capitaine avait nettement moins de dignité.

"Crispez-vous ?" C'est pas plutôt cramponnez vous ?

Durant la véritable histoire de Sully, il n'y avait pas de "méchants" (à part les oies), le réalisateur a donc dû en inventer un, en l'occurrence les vilains bureaucrates du NTSB avec des méthodes de vérification déshumanisées contre le bon vieux pilote exemplaire. Un conflit qui atteint son climax dans une audition complètement bidon (grâce à l'Hollywood touch), qui en plus de faire passer la bureaucratie pour des acariâtres, les prend aussi pour des cons et ça il semblerait que le NTSB ne l'ait pas trop apprécié. D'un autre côté, les acteurs sont tous en grande forme, le scénario qui tient sur une feuille de PQ (le recto seulement) est bien structuré (peut-être que certaines choses auraient néanmoins pu être plus subtiles) et en fait l'ensemble est très bien fichu.

Cependant, lorsque le film se termine sans heurt (c'est de notoriété publique, alors vous crevez pas les yeux) et se conclut par une blague carambar (il manque juste le petit break de batterie) avec un fondu au noir arrosé d'éclats de rire, ma conscience m'a rappelé qu'il n'y avait aucune raison de faire un film sur un tel événement.

Publié dans Films, le coffre à bobines

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